Faut-il avoir peur des écrans ? Conseils pour un bon usage par les enfants



En quelques années, les technologies numériques ont envahi toutes les sphères de notre quotidien. En parallèle, les études et discours alarmistes sur l’usage des écrans par les enfants se multiplient. Obésité infantile, troubles attentionnels, problèmes de langage, et si c’était la faute aux médias ? Si les risques liés à une surexposition sont bien réels, il faut cependant éviter de tomber dans la paranoïa. Doit-on avoir peur des écrans pour nos enfants ? Découvrez le point de vue des scientifiques ainsi que des recommandations pour un bon usage des écrans par les plus jeunes.

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La peur des écrans est-elle justifiée ?

Une stratégie de la peur légitime ?

De la télévision à Internet, l’omniprésence des écrans a bouleversé l’ensemble de la société au cours des dernières décennies. D’abord considéré comme une révolution, le numérique a commencé à susciter de vives inquiétudes auprès des professionnels de l’enfance, relayées par la communauté scientifique. Les études sur l’impact du numérique se sont multipliées au cours des 15 dernières années, et c’est principalement à travers leurs usages problématiques que les écrans sont évoqués.

Addictions, décrochage scolaire, agressivité ou violence, cyberharcèlement, ondes nuisibles, on assiste à une véritable culture de la peur. Dans son livre choc « La fabrique du crétin digital », le neuroscientifique Michel Desmurget nous met en garde contre les  effets néfastes des écrans sur le cerveau de nos enfants. Dans les années 2000, le Docteur Winterstein dévoile une étude alarmiste diffusant des dessins d’enfants déstructurés, les présentant comme une conséquence d’un abus d’écran. Cette stratégie pour convaincre n’est pas sans évoquer celle utilisée pour dissuader de la consommation de tabac.

Vers un juste milieu

Comment ne pas se retrouver désorienté en tant que parents face à ces mises en garde alarmistes et culpabilisatrices d’un côté, et les exigences des enfants de l’autre ? Faut-il diaboliser les écrans et maintenir à tout prix les repères dans lesquels vous avez vous-même grandi ? Cette démarche risque de créer un fossé dans votre relation avec votre enfant, car les outils numériques font bel et bien partie de notre quotidien. Désormais, pour un enfant, posséder un smartphone marque le début de son autonomie par rapport à ses parents. De même, Internet est source d’opportunités et savoir l’utiliser est aujourd’hui devenu une compétence essentielle. Cela n’implique pas pour autant de céder aux appels des fabricants et d’introduire les innovations technologiques dès le plus âge. Et si la bonne attitude se trouvait à mi-chemin ?

Des psychologues comme Pascal Minotte et Serge Tisseron prennent le contre-pied de cette culture de la peur à travers des campagnes de sensibilisation au bon usage des écrans. Quel âge pour Internet ? Comment fixer des limites et lesquelles ? Ces auteurs plaident pour une démarche globale d’éducation aux médias. Accompagner nos enfants et entrer en communication avec eux au sujet de leur utilisation des écrans implique de valoriser leurs côtés positifs tout en informant contre les risques potentiels liés à une surexposition.

Recommandations pour un bon usage des écrans

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Les écrans ne sont ni bons ni mauvais, c’est plutôt l’usage que nous en faisons qui peut être problématique. Or, le jeune enfant ne sait pas de lui-même ce qui est bon pour lui. C’est à vous en tant que parents d’établir des règles et de fixer un cadre pour l’utilisation des écrans. Celles-ci doivent notamment répondre aux questions : où, quand, comment, avec qui et pour quel type de contenu. Voici quelques conseils pour un bon usage des écrans à la maison.

Gérer le temps passé devant les écrans

Le temps d’écran représente le nombre total d’heures par jour que les enfants passent devant les écrans, qu’il s’agisse de la télévision, d’un ordinateur, d’un smartphone ou d’une tablette. Il faut donc définir un temps global d’écran qui inclut tous ces types de médias. Ainsi par exemple, si un enfant de 4 ans passe une demi-heure par jour sur sa tablette autour d’un jeu éducatif accompagné de ses parents, il ne devrait plus être confronté à d’autres écrans durant la journée.

Comment gérer leurs appétits numériques ? Voici une autre question que se posent beaucoup de parents. Il faut garder à l’esprit que les jeunes enfants sont très sensibles à l’avis de leurs parents et ont tendance à les imiter. C’est un paramètre dont il faut avoir conscience au moment de fixer des règles. Un enfant aura beaucoup plus de facilité à réduire son temps d’écran s’il voit ses parents limiter leur consommation également. Plutôt que de diriger, instaurez un dialogue en vue de favoriser un comportement d’auto-régulation.

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Instaurer des moments sans écran

Quel que soit son âge, un enfant se construit à travers les échanges qu’il a avec ses parents et ses pairs. Le repas est un moment convivial, propice à la communication et au partage. Il est donc important que les écrans ne viennent pas s’interposer entre ces échanges. De plus, manger devant la télévision favorise les mauvaises habitudes alimentaires. Distrait, l’enfant ne se rend pas compte des quantités ingérées. Rester passif plusieurs heures par jour devant un écran augmente la tendance au grignotage, ce qui favorise la prise de poids. Les écrans sont souvent pointés du doigt au moment d’évoquer l’obésité, de plus en plus fréquente chez les enfants. Or, ce ne sont pas les écrans en tant que tel mais bien leur surconsommation et la sédentarité qui en résulte qui mène à l’obésité. Un excès d’écran peut nuire à la concentration. Les écrans sont également à proscrire le soir. La lumière bleue émise perturbe l’endormissement. Il est conseillé d’éteindre les écrans au minimum une demi-heure avant l’heure du coucher.

Protéger des contenus inadaptés

Pour protéger votre enfant des écrans, il est important de fixer des règles sur ce à quoi ils ont accès. Pour une meilleure supervision, il est donc recommandé d’installer la télévision dans une salle commune plutôt que dans une chambre. Vérifiez la signalétique d’âge et n’hésitez pas à parler avec votre enfant du pourquoi de ces règles. Un filtre parental accompagné d’un dialogue en parallèle sera beaucoup plus efficace.

Est-ce que mes enfants vont parvenir à établir des relations harmonieuses et à développer leurs potentialités ? Derrière cette peur des écrans se cache des enjeux beaucoup plus profonds. Les écrans seuls ne sont pas responsables de tous les maux. L’usage compulsif du téléphone et des jeux vidéo peut traduire une manière de fuir des angoisses, par exemple. Il est important de rester à l’écoute et de considérer l’individu dans sa globalité pour ne pas passer à côté des vraies difficultés. Comme le souligne Serge Tisseron, « les écrans ne nous menacent pas, c’est leur mauvais usage qui nous menace ».

Lorsque la question « des écrans et des enfants » est omniprésente dans les médias, chez les professionnels de santé et de la petite enfance… si nous tendions l’oreille vers les parents de jeunes enfants ?

Sources :

Caron F.M. (page consultée le 25/11/19). Mpedia, [en ligne]. https://www.mpedia.fr/art-les-ecrans-danger/

Desmurget M. La Fabrique du crétin digital, Seuil, 2019.

Minotte P. Comprendre et gérer nos appétits numériques. Mardaga; 2015.

Minotte P. Qui a peur du grand méchant web ? Fabert; 2012.

Tisseron, S (page consultée le 4/12/2019). Sergetisseron.com, [en ligne]. https://sergetisseron.com/blog/la-strategie-de-la-peur-est-elle-efficace-contre-les-abus-d-ecrans/